Procès choc à la CRIET : L’ex-Général Houndégnon face à de graves accusations, le verdict très attendu
Ce 28 avril, la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET) à Porto-Novo s’est érigée en théâtre d’un procès retentissant, celui de Louis Philippe Houndégnon, ancien directeur général de la police nationale du Bénin. Accusé d’incitation à la rébellion et de harcèlement par voie électronique, l’ex-général, figure influente sous l’ère Boni Yayi, a vu le ministère public requérir contre lui une peine de 2 ans de prison ferme et une amende de 2 millions de FCFA. Ce verdict, encore en suspens alors que les plaidoiries se poursuivent, soulève des questions cruciales sur la liberté d’expression, le devoir de réserve et les limites de la critique politique dans un Bénin en pleine mutation.
Le Passage de l’Ombre : Comment l’ancien DG Police est devenu un critique virulent du pouvoir en place
Pour comprendre ce procès retentissant qui soulève tant de questions, il faut revenir sur la trajectoire de Louis Philippe Houndégnon, général à la retraite, qui n’est pas un inconnu au Bénin. Directeur général de la police nationale sous la présidence de Thomas Boni Yayi (2006-2016), il a marqué les esprits par son charisme et son autorité, avant d’être écarté en 2016 à l’arrivée au pouvoir de Patrice Talon. Depuis, Houndégnon s’est mué en critique virulent du régime, multipliant les interventions sur les réseaux sociaux pour dénoncer la gouvernance de Talon, la fusion police-gendarmerie et les retraites forcées dans les forces de sécurité. Ses prises de parole, souvent relayées par son neveu et co-accusé Camille Coffi Amoussou, ont oscillé entre analyse politique et appels à la mobilisation, suscitant l’ire des autorités.
LA SUITE APRÈS LA PUBLICITÉ
Du projet « 11 & 12 » aux accusations de rébellion : L’affaire Houndégnon, une plongée dans la sphère numérique et politique
Ces prises de position critiques et son activisme numérique ont eu des conséquences judiciaires majeures. Le 13 novembre 2024, Houndégnon est arrêté à son domicile à Abomey-Calavi après une perquisition musclée. Les chefs d’accusation – incitation à la rébellion et harcèlement électronique – s’appuient sur des publications numériques et des échanges privés, notamment avec un ancien ministre de Boni Yayi, où il évoquait la succession de Talon et son projet politique, le mouvement « 11 & 12 ». Ce dernier, selon Houndégnon, visait à fédérer des personnalités pour une alternance démocratique, bien qu’aucun contact formel n’ait été établi. Lors de l’audience de ce lundi, le substitut du procureur a fustigé l’attitude de l’ex-général : « Si vous n’êtes plus sous le drapeau, vous avez le drapeau au corps », une admonestation soulignant que, même retraité, un officier se doit de respecter un devoir de réserve.
Au-delà du Procès : la CRIET, les libertés et la stabilité économique… les enjeux de l’affaire Houndégnon
Ce procès, avec ses accusations basées notamment sur des communications numériques, se déroule devant une juridiction souvent critiquée pour son rôle dans le paysage politique béninois. La CRIET, souvent accusée par l’opposition de servir d’instrument politique, a prononcé des condamnations lourdes contre des figures comme Reckya Madougou (20 ans pour complicité d’acte terroriste) et Joël Aïvo (10 ans pour complot). Dans le cas de Houndégnon, le procureur a reproché à l’accusé d’avoir « incité le peuple à se soulever contre les dirigeants », une accusation grave dans un contexte dans lequel le Bénin, sous Talon, affiche une stabilité économique (croissance de 7,5 % en 2024) mais fait face à des critiques sur la restriction des libertés.
Face aux juges : Houndégnon nie le coup d’État et revendique sa liberté d’expression
Au-delà du contexte général de la CRIET et des critiques qu’elle suscite, le procès de Louis Philippe Houndégnon a suivi un déroulement marqué par des rebondissements et la présentation d’éléments clés. Le procès, reporté à plusieurs reprises (17 mars, 24 mars) en raison de l’absence des prévenus ou de débats procéduraux, a atteint un tournant aujourd’hui. Les éléments à charge incluent des conversations extraites du téléphone de Houndégnon, où il affirmait : « Qu’on me tue ou m’arrête, cela ne me dirait rien », et une liste de personnalités pressenties pour son mouvement. Houndégnon, défendu par un collège d’avocats dont Me François Kèkè Adjignon, a nié toute intention de coup d’État, insistant sur son droit à s’exprimer et son engagement pour un Bénin démocratique.
Une leçon sur le devoir de réserve : les enjeux juridiques et éthiques soulevés par l’affaire de l’ex-DG Police
L’affaire Houndégnon, avec ses accusations (incitation à la rébellion) et les lignes de défense adoptées par l’ex-Général, soulève une question juridique et éthique fondamentale : celle du devoir de réserve, particulièrement pour les anciens hauts fonctionnaires. En droit béninois, ce principe, bien que non codifié précisément, impose aux officiers, même retraités, une retenue dans leurs propos publics, surtout lorsqu’ils touchent à la sécurité nationale. Le procureur a argué que Houndégnon, par ses critiques acerbes et son mouvement « 11 & 12 », a franchi une ligne rouge, incitant à la désobéissance civile. Cette position soulève un débat : où s’arrête le devoir de réserve et où commence la liberté d’expression garantie par la Constitution béninoise ?
Citoyenneté et devoir de réserve : un équilibre délicat posé à l’échelle universelle
Au-delà de l’aspect purement juridique de cette affaire, l’affaire Houndégnon offre une leçon essentielle sur un concept qui dépasse les frontières : comment concilier loyauté envers l’État et critique des gouvernants ? Houndégnon, lors des audiences, a revendiqué son rôle de citoyen engagé, arguant que sa mise à la retraite forcée l’a libéré de certaines contraintes. Il a également rappelé son passé de protecteur, notamment lorsqu’il sécurisait un ministre menacé sous Boni Yayi. Ce discours, mêlant patriotisme et défi, illustre une tension universelle.
Les enjeux politiques pour le Bénin : le procès Houndégnon et la CRIET au cœur des dynamiques de pouvoir
Cette tension universelle, entre devoir et liberté, s’observe avec une acuité particulière dans le contexte politique actuel du Bénin. Au-delà du sort de Houndégnon, ce procès reflète les dynamiques politiques du Bénin à l’approche de la fin du second mandat de Talon en 2026. La CRIET, perçue par certains comme un outil de répression des opposants, est sous le feu des critiques. Des rapports d’Amnesty International dénoncent la restriction des libertés au Bénin, tandis que des observateurs notent que les condamnations visent souvent des figures liées à l’opposition, comme dans les affaires Madougou et Aïvo.
Vigilance citoyenne à l’ère numérique : liberté d’expression et ses limites sur les réseaux sociaux, les leçons du procès
Ce procès n’a pas seulement des implications politiques pour les élites ; il est aussi une source d’apprentissage direct pour les citoyens béninois, notamment dans leur usage du numérique. Pour le public béninois, ce procès est une leçon sur la vigilance citoyenne. Les réseaux sociaux, où Houndégnon s’exprimait, sont devenus un espace de débat, mais aussi de surveillance. Les citoyens, en observant ce procès, apprennent que la liberté d’expression, bien que sacrée, peut heurter des limites lorsqu’elle est perçue comme une menace à l’ordre public.
Justice, libertés, histoire : L’affaire Houndégnon, un procès qui marquera et interrogera les fondements de la nation
Alors que l’issue judiciaire de cette affaire se profile, l’affaire Houndégnon invite d’ores et déjà à une réflexion profonde qui dépasse le cadre légal. Alors que les plaidoiries se poursuivent à la CRIET, l’affaire Houndégnon invite à une réflexion profonde. Pour les juristes, elle interroge l’équilibre entre justice et politique ; pour les citoyens, elle rappelle la fragilité des libertés dans un contexte de consolidation du pouvoir ; pour les historiens, elle s’inscrit dans une lignée de procès marquants, de l’affaire ICC Services à celle de Dangnivo. Houndégnon, qu’il soit condamné ou acquitté, restera une figure emblématique, un homme qui, selon ses mots, « n’a rien à se reprocher ».
Vers une citoyenneté responsable : le procès Houndégnon, un rappel que la liberté s’accompagne d’un devoir envers l’unité et la stabilité.
En ce jour où le sort de l’ex-Général est en jeu, le Bénin se trouve à un carrefour. Pour les générations futures, l’affaire Houndégnon enseignera une vérité universelle : dans une nation, le courage de s’exprimer doit s’accompagner d’une responsabilité envers l’unité et la stabilité. En conclusion, ainsi, sous les ors de la CRIET, se joue bien plus qu’un verdict ; se joue une leçon sur ce que signifie être citoyen dans un monde complexe.