Daniel EdahDepuis Addis-Abeba, l’économiste et analyste politique Daniel Edah adresse une lettre ouverte au président Patrice Talon et aux forces vives du Bénin. Il y propose un gel des réformes en cours et la tenue d’un sommet national inclusif, afin de restaurer la confiance, prévenir l’instabilité et refonder le dialogue démocratique. Une initiative qui fait écho aux tensions révélées par la dernière allocution présidentielle.
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Addis-Abeba, 6 novembre 2025 — Dans une lettre ouverte adressée au président Patrice Talon et à l’ensemble des forces vives du pays, l’économiste et analyste politique Daniel Edah formule une proposition audacieuse pour désamorcer la crise politique qui couve au Bénin. Portée par une vision d’un État prospère et réconcilié au sein d’une Afrique dynamique, cette initiative intervient au lendemain d’une allocution présidentielle qui a mis en lumière les fractures persistantes du paysage politique. Edah plaide pour un gel temporaire des réformes en cours et la tenue d’un grand forum inclusif, afin de restaurer la confiance et de prévenir une dérive vers l’instabilité.
Une allocution présidentielle qui révèle les lignes de fracture
La prise de parole de Patrice Talon, le 4 novembre, a marqué les esprits par sa rare franchise. Le chef de l’État a reconnu l’existence d’un contentieux profond avec son prédécesseur Boni Yayi, dont les répercussions continuent d’empoisonner le climat sociopolitique. Selon Edah, cette rivalité personnelle a contaminé plusieurs réformes majeures, transformant des avancées attendues en instruments de confrontation. Talon, se présentant comme l’architecte exclusif de ces transformations, revendique le droit de les moduler à sa convenance, rendant toute alliance durable avec l’opposition illusoire. Une posture qui, selon l’auteur, révèle les limites d’un système partisan réformé mais encore inadapté aux échéances de 2026.
Un cadre électoral sous tension
Les réajustements du calendrier législatif, contrastant avec l’inflexibilité présidentielle et les reports successifs des scrutins municipaux, illustrent, selon Edah, les dysfonctionnements d’un processus électoral en panne. Le seuil de 20 % des voix par circonscription pour accéder au Parlement constitue un verrou quasi infranchissable pour les partis isolés, les contraignant à des alliances fragiles. Plus encore, l’absence du principal parti d’opposition dans la course à la magistrature suprême cristallise les tensions. Pour Edah, ces anomalies ne sont pas de simples détails techniques : elles risquent d’aggraver les divisions à un moment où le pays a besoin d’unité pour relever ses défis collectifs.
Daniel Edah propose une sortie de crise par le retrait concerté
L’analyste entrevoit pourtant une lueur d’espoir dans les propos du président Talon, qui a laissé entrevoir une prise de conscience : celle que la « gouvernance punitive », nourrie de différends personnels, nuit à la cohésion nationale et au quotidien des citoyens. L’idée d’un retrait simultané de la scène politique avec Boni Yayi, bien que lancée unilatéralement, traduit selon Edah une volonté de réconciliation. « Toute démarche, même vertueuse, devient intenable si elle est dictée par la revanche », écrit-il, appelant à dépasser les ego pour faire primer la paix civile et la vitalité démocratique.
Un dialogue inclusif comme antidote à la défiance
Face à une atmosphère de suspicion généralisée, Edah exhorte Talon à suspendre provisoirement le train des élections et la révision constitutionnelle en vue. Il propose un sommet national extraordinaire, sous l’égide des autorités, regroupant tous les courants politiques et acteurs sociétaux. Il invite les alliés du président à endosser ce virage vers la cohésion, tandis qu’il convie Boni Yayi et son parti Les Démocrates à y contribuer via leurs élus, si l’initiative est lancée. Sur le plan régional, il presse la CEDEAO et l’Union africaine d’appuyer cette démarche, non seulement pour sauvegarder la démocratie béninoise, mais aussi pour ancrer la stabilité dans le golfe de Guinée. Finalement, il somme les partenaires internationaux – Nigeria, Afrique du Sud, France, États-Unis, Allemagne et Pays-Bas – de se mobiliser pour cet élan salvateur.
Vérité, équité et garde-fous institutionnels
Ce cadre de concertation, précise Edah, ne doit en aucun cas se transformer en tribunal partisan. Il doit être un espace de vérité, de franchise et d’ouverture, destiné à rebâtir la confiance entre les élites, à garantir un scrutin futur impartial et à doter le pays de mécanismes durables contre toute dérive autoritaire ou exclusionniste. Le Bénin, fort de son héritage de dialogue et de consensus, se trouve à un tournant historique où l’intérêt national doit prévaloir sur les logiques de clan. « Choisissons la tranquillité et la solidarité pour la paix, la démocratie et la croissance », conclut l’auteur, en appelant ainsi à renouer avec l’esprit de concorde légué par les aînés.
Daniel Edah : une main tendue depuis Addis-Abeba
Signée depuis Addis-Abeba, cette lettre ouverte résonne comme un cri du cœur pour un Bénin apaisé. À l’approche des élections de 2026, elle pourrait catalyser un momentum inédit, transformant les ombres de la discorde en lumière d’un avenir partagé. Les regards se tournent désormais vers Cotonou : le président Talon saisira-t-il cette main tendue, ou laissera-t-il passer l’occasion d’un sursaut national ?
