Justice




Cotonou : Stevy Wallace contre Angela Kpeidja

Un duel judiciaire au cœur de Cotonou : Stevy Wallace contre Angela Kpeidja, une affaire qui électrise le Bénin Cotonou,…

Un duel judiciaire entre Angela Kpeidja et Stevy Wallace secoue Cotonou, où le ministère public requiert 6 mois de prison avec sursis

Un duel judiciaire au cœur de Cotonou : Stevy Wallace contre Angela Kpeidja, une affaire qui électrise le Bénin

Cotonou, 1 juillet  2025 – Dans l’enceinte solennelle du Tribunal de Première Instance de Cotonou, une bataille judiciaire aux accents de tragédie contemporaine s’est jouée  lundi, sous les regards scrutateurs d’une salle comble et d’une opinion publique en ébullition. Au centre de ce drame : Angela Kpeidja, journaliste et figure emblématique de la lutte contre les violences faites aux femmes, et Stevy Wallace, ancien responsable de la communication digitale à la présidence du Bénin.

L’accusation ? Harcèlement par voie électronique, dans une affaire surnommée avec une pointe d’ironie « psychopathe gâté». Le ministère public, tel un chef d’orchestre implacable, a requis six mois de prison avec sursis et une amende de 2 millions de FCFA contre la journaliste. Mais derrière les réquisitions, c’est un choc des vérités et des réputations qui secoue le Bénin.

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 Angela Kpeidja : Une absence qui fait parler

L’audience a débuté sous une tension palpable. Angela Kpeidja, la principale accusée, brillait par son absence à la barre, une décision perçue comme un affront par les avocats de Stevy Wallace. « Une défiance envers la Cour », ont-ils martelé, brandissant cet acte comme une preuve de l’arrogance de la journaliste. De son côté, Stevy Wallace, présent et déterminé, a laissé ses avocats, menés par Me Hugo Koukpolou, tisser une toile d’accusations accablantes. Selon eux, les publications d’Angela Kpeidja sur les réseaux sociaux, bien que ne nommant pas explicitement Wallace, l’auraient dépeint comme un prédateur, un « obsédé sexuel » attirant de jeunes femmes via de fausses annonces de recrutement. Une atteinte à l’honneur, clament-ils, qui aurait coûté à Wallace des contrats professionnels et terni son image.

Le ministère public, représenté par le troisième substitut du procureur spécial près la CRIET (Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme), a enfoncé le clou. Pour le parquet, les faits de harcèlement électronique sont établis. Angela Kpeidja aurait par ses publications et ses interactions en ligne – notamment en « likant » un post incriminant directement Wallace – porté atteinte à sa réputation sans apporter de preuves tangibles de ses allégations. « Elle l’a traité de violeur et de harceleur sans fondement », a asséné le procureur, justifiant ainsi la réquisition d’une peine de six mois de prison avec sursis et une amende de 2 millions de FCFA.

Une demande de réparation pharaonique

Par ailleurs, la partie civile, elle, ne s’est pas contentée de la sanction pénale. Les avocats de Stevy Wallace ont réclamé une réparation colossale : 80 millions de FCFA pour compenser les préjudices moraux et professionnels subis. Une somme jugée « exorbitante » par le ministère public, qui a proposé de la ramener à 20 millions de FCFA dans le verdict final. « Les publications de Kpeidja ont dressé un portrait-robot de notre client, causant un préjudice irréparable », a plaidé Me Koukpolou, invoquant des violations des articles 272 du Code de l’information et 550 du Code du numérique.

Angela Kpeidja, de son côté, a toujours nié avoir visé directement Stevy Wallace dans ses publications. Militante féministe reconnue, elle s’est aussi  forgée une réputation de porte-voix des victimes de harcèlement et de violences sexuelles, notamment à travers son ouvrage “Bris de Silence” (2021) et ses récents livres lancés en novembre 2024, “À l’encre de nos silences”et “Philognon, une voix qui s’élève !”. Ses écrits, souvent crus, dénoncent les abus systémiques dont sont victimes les femmes, un combat qui lui a valu autant d’admiration que de controverses dans une société béninoise encore marquée par des conservatismes.

Un verdict en suspens, une société en question

L’absence de la journaliste à l’audience a alimenté les spéculations. Stratégie de défense ou aveu implicite ? Ses soutiens y voient une posture de résistance face à ce qu’ils qualifient de tentative d’intimidation. Car au-delà du cas Kpeidja, c’est la question de la liberté d’expression et du militantisme en ligne qui est en jeu. Dans un pays où les affaires de mœurs restent souvent cloisonnées dans le silence, les prises de position d’Angela Kpeidja, relayées par des milliers de réactions sur les réseaux sociaux, ont brisé des tabous. Mais à quel prix ?

Le délibéré, attendu pour le 6 octobre 2025, promet d’être un moment décisif. Une condamnation pourrait aussi fragiliser la croisade de Kpeidja contre les violences basées sur le genre, tandis qu’une relaxe pourrait être perçue comme une validation de ses méthodes, au risque d’alimenter les critiques sur la responsabilité des influenceurs. Quant à Stevy Wallace, il espère une décision exemplaire qui rétablirait son honneur et enverrait également un signal fort contre les accusations publiques non étayées.

Une affaire qui dépasse les protagonistes

En somme, ce duel judiciaire, au croisement de la liberté d’expression, de la lutte féministe et de la protection de la réputation, transcende les deux protagonistes. Il interroge la société béninoise sur ses valeurs, ses silences et ses combats. Angela Kpeidja, devenue pour certains « la folle du Bénin » en raison de son franc-parler, incarne une voix qui refuse de se taire. Stevy Wallace, lui, revendique le droit à ne pas être cloué au pilori sans preuves. Dans ce face-à-face, c’est tout un pays qui retient son souffle, attendant de savoir si la justice penchera pour le bâillon ou pour la parole libérée.

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