Alors que l’Europe et le Royaume-Uni, en quête perpétuelle de vertu alimentaire, viennent d’inscrire dans le marbre législatif l’apothéose des protéines du futur, à savoir : insectes et autres invertébrés, une question se pose : s’agit-il d’une réelle avancée écologique ou d’une simple opération marketing ? Décryptage d’une tendance qui suscite autant le scepticisme que l’enthousiasme .
Insectes à gogo : enquête sur un marché en plein essor
Exit le bœuf bourguignon, place au cricket crunch ! Longtemps répulsifs, les insectes sont désormais présentés comme la solution miracle pour nourrir la planète. Une révolution marketing orchestrée par les géants de la foodtech. Armés de leurs chaînes de production et de leur jargon marketing, ils ont converti l’humble insecte en or comestible. Exo Protein et Chapul, pionniers états-uniens, vendent des barres protéinées à base de grillons comme s’il s’agissait de reliques sacrées. En Europe, Jimini’s (France) et Cricket Flours transforment les assiettes en terrariums gourmands, tandis qu’Entomo Farms (Canada) inonde le marché de farine d’arthropodes, présentée comme la panacée nutritionnelle.
Mais derrière ce vernis durable, une réalité moins appétissante : l’entomophagie industrielle, nouveau champ de bataille pour les géants de l’agroalimentaire, avides de surfer sur la vague woke des ODD (Objectifs de Développement Durable). Car qui dit alternative écologique dit aussi marges juteuses. Certaines entreprises n’hésitent pas à mettre en avant des arguments écologiques parfois peu crédibles, tandis que d’autres misent sur le marketing de la « nouveauté » pour attirer les consommateurs.
L’entomophagie industrielle est-elle la solution miracle pour nourrir la planète, ou un simple mode passager ? Seul l’avenir nous le dira. En attendant, il est essentiel de rester vigilant quant aux motivations réelles des acteurs de ce marché en plein essor et d’approfondir la réflexion sur les enjeux environnementaux, sanitaires et socio-économiques liés à cette nouvelle forme d’alimentation.
Étiquetage : transparence à géométrie variable
Par ailleurs, les régulateurs, dans un élan de magnanimité bureaucratique, exigent désormais que les paquets de pâtes aux ténébrions arborent un avertissement : « Peut contenir des traces de crustacés… ou de cousins évolutifs à six pattes ». Une précaution qui souligne la parenté inattendue entre ces petites bêtes et nos fruits de mer préférés et qui rappelle que les allergies ne connaissent pas les frontières taxonomiques. Une précaution salutaire, certes, mais qui soulève aussi des questions sur la manière dont sont produits ces aliments.
Mais gageons que cette transparence s’arrêtera là où commencent les profits. Rappelons-nous le scandale de la viande de cheval en 2013 : des lasagnes au bœuf qui n’en avaient que l’étiquette… jusqu’à ce que des lanceurs d’alerte fassent hennir la vérité. Des lasagnes au bœuf qui n’en avaient que l’étiquette, tout comme ces pâtes aux insectes qui pourraient bien cacher d’autres surprises… Les insectes, nouveaux chevaux de Troie de l’industrie, seront-ils mieux traqués ? On peut en douter, tant ils offrent aux industriels un moyen de réduire leurs coûts de production tout en se donnant une image d’entreprise soucieuse de l’environnement. L’avenir nous le dira, à moins que les audits ne se transforment en chasse aux drosophiles… ou à d’autres insectes moins « nobles » que ceux mis en avant par l’industrie.
L’étiquetage des aliments est-il un outil suffisant pour garantir la transparence et informer les consommateurs ? Sans doute que non. Il est essentiel de s’intéresser à l’ensemble de la chaîne de production, de la fourche à l’assiette, pour comprendre les enjeux réels de l’alimentation de demain.
L’Afrique en ligne de mire : gastronomie ou colonialisme alimentaire ?
« Nous, Africains, sommes les prochains sur la liste », s’alarment certains observateurs. Et pour cause : le continent, déjà laboratoire des OGM et dépotoir de poulets congelés, pourrait bien devenir le réceptacle des surplus d’insectes « made in Europe ».
Sous couvert de « sécurité alimentaire »,un argument qui mérite d’être pris au sérieux, se profile une nouvelle forme de paternalisme culinaire : « Mangez des criquets, pauvres gens, pendant que nous gardons le filet mignon ! » Une stratégie habile : présenter l’entomophagie comme un privilège éthique pour les Occidentaux éclairés, soucieux de l’impact environnemental de leur alimentation… et une nécessité frugale pour les autres, condamnés à se nourrir de ce qui est disponible.
À quand des ONG, bras armés de cette nouvelle forme de colonialisme alimentaire, distribuant des barres de grillons dans les écoles africaines, sous couvert de lutte contre la malnutrition et de réduction de l’empreinte carbone ?
S’agira-t-il d’une nouvelle forme d’exploitation qui ne ferait qu’aggraver les inégalités et la dépendance du continent ? Il est essentiel de poser ces questions et d’écouter la voix des Africains eux-mêmes, avant de tirer des conclusions hâtives.
Consommateurs, reprenez le contrôle de vos assiettes !
Face à cette invasion rampante, un mot d’ordre : la rébellion par le caddie. Les « grands détaillants », ces évangélistes du profit vert, comptent sur notre passivité pour écouler leurs sachets de poudre de mouches noires. Mais nous, consommateur avisé, détenons une arme : notre droit de dire non, en achetant… littéralement autre chose.
Car ne nous y trompons pas : si les insectes deviennent un pilier de nos régimes, ce ne sera ni par altruisme écologique ni par gourmandise, mais parce que quelques actionnaires auront flairé le filon. Alors, avant de mordre dans une barre énergétique protéinée aux grillons, souvenez-vous : chaque bouchée est un vote. Et peut-être, un aveu de complicité dans cette mascarade nutritionnelle.
Alors, la prochaine fois que vous ferez vos courses, posez-vous la question : suis-je un consommateur passif ou un acteur de ma propre alimentation ?
Attention, insectes à risques !
D’ailleurs, l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture des Nations unies (FAO) elle-même le reconnaît : les insectes peuvent être de véritables nids à microbes. Des cas de botulisme liés à la consommation d’insectes ont été signalés en Afrique. Si le risque de transmission du virus semble faible – ou prétendument faible, car on peut légitimement douter de la transparence de ces études -, d’autres dangers sont bien réels.
En Asie, certains insectes sont porteurs de parasites, même si le phénomène reste encore mal documenté. Et que dire des substances toxiques sécrétées par certains insectes, comme le ténébrion meunier adulte et sa benzoquinone ?
Mais le risque le plus insidieux est sans doute celui des allergies. Les protéines de grillon sont étonnamment similaires à celles des crustacés, nos crabes, crevettes et homards. Allergiques à ces derniers, attention aux réactions en chaîne avec les insectes ! Même topo pour les personnes sensibles aux acariens et aux blattes. Et gare aux allergies croisées : la FAO souligne que des patients allergiques aux fruits de mer ont enregistré de graves réactions au ver de farine. Alors, prêts à croquer ?
Le criquet dans la machine
En 2023, l’humanité découvre que son salut passe par l’ingestion d’insectes. Ironie suprême : après avoir exterminé les nuées de criquets pour sauver les récoltes, la voilà qui les élève en batterie pour sauver… son bilan carbone. Reste à savoir si cette farce entomologique résistera au prochain scandale sanitaire ou à la première grève des éleveurs de ténébrions. En attendant, gardez vos éprouvettes loin de nos assiettes : L’avenir gastronomique devient-il un laboratoire à ciel ouvert ? L’entomophagie industrielle : une solution miracle, une future crise sanitaire ou une nouvelle illusion ?