À Porto-Novo, les flammes du carrefour Hubert Maga ne réclament pas seulement des salaires : elles portent la voix d’une dignité ouvrière trop longtemps ignorée.
Porto-Novo, le 12 septembre 2025 – Dans la chaleur matinale du jeudi, un vent de colère a soufflé sur le carrefour Hubert Maga, au cœur de la capitale béninoise. Des ouvriers de l’entreprise chinoise Sinohydro, pour la plupart coffreurs, ferrailleurs et manœuvres, ont brisé le silence pour dénoncer une injustice criante : le non-paiement de leurs salaires des mois de juillet et août. En conséquence, ce mouvement de grève, à la fois spontané et symbolique, incarne la résilience d’une main-d’œuvre déterminée à faire valoir ses droits, tout en mettant en lumière les tensions sociales et économiques qui secouent les chantiers du Bénin.
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Une mobilisation pour la dignité salariale
Réunis dès les premières heures du jeudi devant le siège de Sinohydro, les travailleurs des sites de Damagourou et Banikani ont transformé leur frustration en un acte de résistance. Sous la bannière de leur sous-traitant, ces ouvriers, dont le labeur soutient des projets d’infrastructure majeurs, ont exprimé leur ras-le-bol face à des promesses salariales non tenues. Leur action, loin d’être anodine, traduit un sentiment d’abandon et une quête de justice dans un secteur où leur contribution est essentielle.
Armés de branchages et de détermination, les manifestants ont allumé des brasiers improvisés, alimentés par du bois et des appareils électroménagers hors d’usage collectés sur place. Ces flammes, visibles de loin, ne sont pas seulement un signal de détresse : elles symbolisent un refus de se résigner et un appel vibrant à être entendus par l’entreprise et les autorités. Le choix du carrefour Hubert Maga, lieu emblématique de Porto-Novo, ancre ce mouvement dans le territoire, transformant un conflit salarial en un enjeu d’identité collective.
Porto-Novo : un brasier de lutte ouvrière
Cette grève dépasse le simple cadre d’un différend salarial. Elle s’inscrit, en effet, dans une histoire plus large, celle des luttes ouvrières qui, à travers le temps, ont forgé les droits des travailleurs. En brandissant leurs branchages, les ouvriers de Sinohydro évoquent une symbolique forte : celle de la nature brute face à une modernité qui semble les oublier. Leur rassemblement devant l’usine témoigne d’une volonté de rendre visible leur combat, non seulement à l’entreprise chinoise, mais aussi à la société béninoise tout entière. Ainsi, ce n’est pas seulement une entreprise qu’ils interpellent, mais tout un système qui, par son silence, risque de fragiliser la cohésion sociale du pays.
Une crise aux racines profondes
Au-delà de l’éclat des flammes et des slogans, cette grève met en lumière des problématiques structurelles. Les ouvriers, employés via un sous-traitant, pointent du doigt des pratiques de gestion qui laissent les travailleurs en première ligne sans rémunération. En plus, le retard des salaires des mois de juillet et août, période où les chantiers battent leur plein, a plongé ces familles dans une précarité accrue. Ce retard, perçu comme une trahison, alimente un sentiment d’injustice qui pourrait avoir des répercussions plus larges sur la confiance envers les grands projets d’infrastructure portés par des acteurs étrangers.
Porto-Novo, un appel pour la dignité ouvrière
La colère des ouvriers de Sinohydro n’est pas seulement un cri de désespoir : elle constitue un signal d’alarme adressé à l’ensemble des parties prenantes – entreprises, sous-traitants, autorités – pour que la dignité des travailleurs devienne une priorité non négociable. Porto-Novo, théâtre de cette mobilisation, incarne un tournant. À travers ses ouvriers, le Bénin rappelle au monde que le progrès ne saurait s’ériger sur l’injustice.
En l’absence d’une réponse concrète de Sinohydro, les flammes du carrefour Hubert Maga continuent de brûler dans les esprits, comme une braise vive de la lutte pour les droits des travailleurs. Reste à savoir si ce sursaut, encore isolé, amorcera une prise de conscience plus large sur les conditions de travail dans le secteur de la construction – au Bénin et au-delà.
