Cotonou, 31 janvier 2025 — À l’heure où les candidatures pour la présidence de la Banque Africaine de Développement (BAD) se scellaient dans l’urgence, Romuald WADAGNI, ministre béninois de l’Économie et des Finances, a choisi de tirer un trait sur ses ambitions continentales. Un désistement inattendu, survenu en catimini à quelques encablures de la clôture, qui laisse les cercles économiques africains en proie à une perplexité teintée de spéculations.
WADAGNI: un retrait en forme d’énigme
Considéré comme un favori de cette course à la gouvernance de l’institution financière panafricaine, WADAGNI incarnait l’espoir d’une candidature porteuse de la « success story » béninoise. Sous son magistère, le Bénin a en effet navigué à contre-courant des crises globales, des pandémies, des tensions ukrainiennes en maintenant une croissance insolente de plus de 5 % annuelle. Un bilan qui aurait dû faire de lui un ambassadeur naturel des ambitions de réforme de la BAD.
Pourtant, le ministre a préféré un repli silencieux à la lumière des projecteurs. « Une décision qui interroge autant qu’elle déconcerte », lâche un diplomate ouest-africain sous couvert d’anonymat. Les hypothèses fusent : pressions internes, calcul politique en vue d’un mandat national ou simple lassitude face aux jeux d’influence régionaux ? Aucune explication officielle ne vient étayer ces conjectures, laissant le champ libre à une valse d’interprétations.
La BAD, nouveau théâtre des jeux de puissance
Ce retrait in extremis ouvre une brèche dans laquelle s’engouffrent désormais d’autres prétendants. Swazi TSHABALALA, figure sud-africaine aguerrie des marchés financiers, et Amadou HOTT, ex-ministre sénégalais et architecte de l’initiative « Desert to Power » , deviennent les nouveaux pions d’un échiquier dans lequel se mêlent rivalités géopolitiques et quête de leadership transformatif.
Si TSHABALALA incarne l’axe austro-africain, soucieux de renforcer les partenariats public-privé, HOTT, lui, porte l’étendard d’une transition énergétique accélérée. «La bataille ne sera pas seulement entre individus, mais entre visions du développement africain », analyse un expert de la finance basé à Abidjan.
Wadagni : un fantôme dans le débat ?
L’absence soudaine du Béninois laisse toutefois un goût d’inachevé. Était-ce une manœuvre pour éviter un affrontement perdu d’avance, face à des poids lourds mieux armés en réseaux et soutiens régionaux ? Ou une stratégie délibérée du gouvernement béninois pour recentrer ses priorités ? Wadagni reste un pilier de la « rupture » talonnienne. Son retrait pourrait cacher une réaffectation domestique ambitieuse, avance une source proche du palais de Marina.
Reste que cette décision éclabousse, malgré elle, les fragilités structurelles de la gouvernance africaine. « Les candidatures à la tête d’institutions comme la BAD sont souvent le fruit de marchandages opaques entre États. » « Wadagni, en se retirant, a peut-être évité de jouer un rôle dans une pièce déjà écrite », souligne un éditorialiste économique.
Les non-dits d’une ambition contenue
En renonçant à la course, Romuald WADAGNI a peut-être offert à l’Afrique une leçon de réalisme politique. Mais son geste, aussi énigmatique soit-il, révèle les fissures d’un système où les compétences individuelles peinent parfois à transcender les logiques de blocs.
Alors que la BAD s’apprête à tourner une nouvelle page, une question persiste : et si ce retrait n’était que l’acte I d’une recomposition plus vaste, où le Bénin, discrètement, prépare son prochain coup d’éclat sur l’échiquier continental ? Dans les coulisses du pouvoir, on chuchote déjà que l’histoire n’a pas fini de s’écrire.