Dakar, 1ᵉʳ décembre 2025 – Les régulateurs francophones passent à l’offensive. Ce lundi s’ouvre à Dakar le tout premier Forum de dialogue entre le REFRAM (Réseau des Instances Francophones de Régulation des Communications), le RIARC (Réseau des Instances Africaines de Régulation de la Communication) et les géants du numérique (Meta, TikTok, Google, YouTube…), un rendez-vous stratégique qui entend transformer les belles promesses d’Abidjan 2024 en actes concrets.

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Dakar : le Bénin est en première ligne
Une délégation de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC), conduite par son vice-président Me Mohamed Baré et la coordonnatrice du secrétariat exécutif du RIARC, Rosette Mireille Bessou-Houngnibo, a pris place parmi les têtes pensantes de la régulation africaine francophone. Leur objectif : ne plus subir la loi des plateformes, mais co-écrire les règles du jeu.

Abidjan 2024 → Dakar 2025 : le temps de l’exécution
Il y a dix-neuf mois, à Abidjan, les mêmes acteurs avaient signé un « protocole d’engagement volontaire » historique : modération accélérée des discours de haine, protection renforcée des mineurs, transparence des algorithmes, lutte contre la désinformation électorale. Cependant, malgré beaucoup de signatures, peu de résultats concrets ont suivi. Dakar est venu rappeler que la patience a des limites.
« On ne veut plus de déclarations d’intention. Désormais, on veut des chiffres, des délais et sanctions en cas de manquement », a lancé en ouverture Mamadou Oumar Ndiaye, président du CNRA sénégalais et actuel patron du REFRAM.
Le Bénin pousse, l’Afrique francophone suit
La présence béninoise n’est pas symbolique. En effet, avec la Côte d’Ivoire, le Bénin est l’un des pays les plus avancés en matière de régulation des réseaux sociaux : suspension ciblée de plateformes en période électorale, accords de coopération directe avec Meta et TikTok, création d’un observatoire national des contenus en ligne. Autant d’expériences que Cotonou est venu partager… et défendre.
« Nous avons prouvé qu’on pouvait obliger les géants du numérique à s’asseoir à la table africaine sans attendre Bruxelles ou Washington », a glissé un membre de la délégation béninoise en marge des travaux.

Dakar : au menu des deux jours
Le programme est chargé et orienté vers l’action concrète :
- Évaluation sans concession des engagements pris à Abidjan
- Présentation par Meta, TikTok et Google de leurs outils de modération en langues africaines (haoussa, wolof, swahili, lingala…)
- Masterclass OIF sur la supervision des plateformes en temps de crise (élections, crises sanitaires).
- Adoption d’un Plan d’action 2026-2027 avec calendrier précis et mécanismes de suivi
Pour la première fois, les régulateurs africains parlent d’une seule voix : il n’est plus question de laisser les plateformes décider seules du sort de l’information sur le continent. Et le Bénin, discret mais déterminé, est en train de devenir l’un des porte-étendards de cette nouvelle souveraineté numérique francophone.
À la sortie de la première journée, un haut responsable du RIARC résumait l’état d’esprit : « On n’est plus là pour négocier notre place. On est là pour l’imposer. »
Ainsi, le message est passé. Reste à voir si les géants du web l’ont bien entendu. Désormais, le temps des discussions polies est révolu : les régulateurs exigent des preuves, des dates et des sanctions. Les plateformes, acculées par cette nouvelle unité africaine, devront choisir entre la coopération active ou la confrontation réglementaire. Le bras de fer pour la souveraineté numérique ne fait que commencer.
