Cotonou, 24 octobre 2025 – Coup de théâtre dans l’affaire du retrait de parrainage de Sodjinou : la Cour constitutionnelle du Bénin a déclaré, jeudi 23 octobre, son incompétence à statuer sur le litige opposant le député à son parti, Les Démocrates. En renvoyant l’affaire devant les juridictions ordinaires, elle entérine une décision antérieure favorable au parlementaire et prive, de facto, l’un des principaux partis d’opposition d’une candidature à la présidentielle.
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Parrainage litigieux et fracture interne
Le différend trouve son origine dans l’inscription controversée de Michel Sodjinou comme parrain du ticket présidentiel porté par Vignilé Renaud Léandre N’doufou Agbodjo et Jude Bonaventure Lodjou. Le député affirme que son soutien a été enregistré sans son consentement, une irrégularité dénoncée devant le tribunal de Cotonou. Celui-ci lui a donné raison, annulant l’usage du document et ordonnant sa restitution.
Refusant cette décision, Les Démocrates ont saisi la Cour constitutionnelle, estimant que le litige relevait du droit électoral. Un argumentaire qui visait à contourner les tribunaux classiques et à faire passer le litige pour une question de conformité aux normes fondamentales de la démocratie béninoise.
Affaire Sodjinou : une ligne rouge posée par la Cour
Décidément, la Haute Juridiction ne partage pas l’analyse des Démocrates. Dans un arrêt rendu le 23 octobre, elle estime que le différend relève d’un désaccord interne sans portée constitutionnelle. « Ce n’est pas une contestation de validité électorale, mais un contentieux interne classique », ont résumé les sages, renvoyant l’affaire devant les juridictions de droit commun – tribunal et cour d’appel – pour un examen approfondi.
Cette décision enterre les espoirs de recours rapide du parti et confirme l’ordonnance rendue à Cotonou. Michel Sodjinou conserve son parrainage et pourrait le réorienter. Pour Les Démocrates, c’est un revers majeur : la CENA a déjà écarté le duo Agbodjo-Lodjou de la liste provisoire des candidats, les privant ainsi d’un ticket présidentiel pour 2026.
Affaire Sodjinou : une opposition fragilisée, un débat relancé
Au-delà du volet juridique, cette affaire affaiblit l’opposition. Les Démocrates, pilier historique face au pouvoir, se retrouvent dans une impasse à quelques mois du scrutin. Un ultime recours en cassation reste possible, mais limité aux vices de forme.
La décision marque aussi une clarification jurisprudentielle : les litiges sur les parrainages ne pourront plus être érigés en crises constitutionnelles. Ils devront suivre le circuit judiciaire classique, évitant l’encombrement de la Cour suprême.
Mais, les enjeux dépassent les tribunaux. Pour plusieurs analystes, cette affaire révèle les limites du système de parrainage : censé filtrer les candidatures, il entrave parfois les dynamiques internes, notamment dans l’opposition. « C’est un outil de légitimation, mais il peut devenir un verrou antidémocratique », estime un expert en droit électoral.
Vers une présidentielle sous tension
À l’approche de 2026, l’affaire Sodjinou illustre les tensions croissantes autour du jeu électoral béninois. Les Démocrates, affaiblis sur les plans judiciaire et administratif, devront revoir leur stratégie ou nouer des alliances. Sodjinou, lui, s’affirme comme un acteur indépendant, prêt à tracer sa propre voie.
Dans ce climat incertain, une chose est sûre : chaque fiche de parrainage pourrait peser plus lourd qu’un bulletin de vote. La Cour constitutionnelle a rappelé les règles, mais le terrain politique reste plus imprévisible que jamais.
Et une série de questions s’impose, troublantes autant que révélatrices :
- Pourquoi Michel Sodjinou a-t-il décidé de contester son parrainage à la dernière minute ?
- A-t-il déposé sa fiche sous contrainte, comme s’il avait un pistolet sur la tempe ?
- Ignorait-il qu’un nom pouvait être inscrit sans validation explicite lorsqu’il déposait sa fiche à blanc ?
- Pourquoi est-il le seul membre des Démocrates à s’être plaint de la procédure ?
- Que gagne-t-il réellement à voir son propre parti exclu des joutes électorales ?
- Est-il la taupe tant redoutée au sein des Démocrates ?
Autant d’interrogations qui, à défaut de réponses immédiates, alimentent les soupçons et redessinent les lignes de fracture d’une présidentielle sous haute tension.
