Cotonou, 4 février 2025 – Dans un ballet de costumes cintrés et d’agendas surchargés, la capitale économique béninoise a vibré ce mardi au rythme d’une ambition commune : repenser l’architecture fiscale de l’Afrique de l’Ouest. Sous l’égide d’Hermann Orou Takou, directeur de cabinet du ministre d’État chargé de l’Économie et des Finances, un atelier de haut niveau a ouvert ses portes, dédié à l’élaboration des plans d’actions post-TADAT et des stratégies de réforme des administrations fiscales. En effet, un cénacle inédit, où experts régionaux et institutions financières tentent de tisser une toile méthodologique face à l’urgence de moderniser la collecte de l’impôt, pierre angulaire des économies en mutation.
TADAT : le sésame universel d’une fiscalité transparente
Par ailleurs, Depuis son avènement en 2015, le Tax Administration Diagnostic Tool (TADAT) s’est imposé comme la boussole incontestée des administrations fiscales en quête d’auto-évaluation. Nicolas Yenoussi, directeur général des impôts du Bénin, en a rappelé les vertus : « Sa méthodologie rigoureuse et standardisée permet de radiographier avec précision les forces et les vulnérabilités de nos systèmes ». Le Bénin, laboratoire zélé de cet outil, a subi son deuxième examen en 2023, après une première évaluation en 2019 et une auto-évaluation en 2022. Un parcours jalonné de progrès, mais aussi de défis persistants, que cet atelier entend aborder en levier collectif.
L’intelligence collective contre le cloisonnement des savoir-faire
Si chaque pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) possède son ADN fiscal, tous partagent un constat : l’isolement des bonnes pratiques freine leur essor. « Mutualiser les expériences pour forger des plans d’action plus robustes, armés d’indicateurs SMART », a plaidé Yenoussi, insistant sur la nécessité de transformer cet atelier en chambre d’échos stratégique. Une vision partagée par Modeste Some, représentant résident du FMI au Bénin, pour qui l’événement doit accoucher d’une matrice régionale, un cadre harmonisé de réformes fiscales, combinant rigueur technique et adaptabilité locale.
AFRITAC Ouest et FMI : architectes d’une renaissance fiscale
Co-organisé par le Centre régional d’assistance du FMI pour l’Afrique de l’Ouest (AFRITAC Ouest) et le Département des finances publiques (FAD) du FMI, l’atelier rassemble un aréopage de décideurs : directeurs généraux des impôts, stratèges des réformes fiscales, et représentants de la Commission de l’UEMOA. Un casting d’exception, qualifié par Some d’atout majeur pour dessiner une feuille de route ambitieuse. Au menu des travaux : l’élaboration d’un référentiel régional post-TADAT, l’audit des stratégies de mobilisation des recettes à moyen terme, et surtout, l’évaluation de l’impact réel de l’assistance technique du FMI, un exercice d’humilité institutionnelle rarement assumé.
Hermann Orou Takou : le plaidoyer pour une fiscalité sans frontières
Dans son allocution d’ouverture, Hermann Orou Takou a salué cette occasion unique de transcender les égoïsmes nationaux. « Confronter nos expériences, c’est offrir à nos économies des anticorps contre la fragmentation », a-t-il affirmé, appelant à une solidarité technocratique. Avec neuf pays sur dix de la zone AFRITAC Ouest déjà évalués par le TADAT mais seulement quatre ayant mené une seconde évaluation, le chemin vers l’harmonisation reste semé d’embûches. Pourtant, le directeur de cabinet y voit un terreau fertile : « De ces assises naîtront des recommandations pour accroître substantiellement nos recettes fiscales, sang vital de nos États ».
La quadrature du cercle ouest-africain
Alors que les débats se poursuivront jusqu’au 7 février, une question plane : comment concilier standardisation internationale et réalités locales ? Si le TADAT offre un langage commun, son application butte sur les spécificités socio-économiques: informalité massive, numérisation balbutiante, défiance citoyenne. L’enjeu, désormais, est de transformer cet atelier en chantier permanent, où la mutualisation des succès et des échecs deviendrait une culture, plutôt qu’une exception.
Dans un continent où l’impôt reste trop souvent perçu comme une prédation plutôt qu’un contrat social, Cotonou tente d’écrire un nouveau chapitre : celui d’une fiscalité panafricaine, audacieuse et inclusive, capable de muer l’obligation en adhésion. Gageons que les actes suivront les mots, car sans recettes, point de développement.