Alors que l’Afrique de l’Ouest traverse une période de turbulence sécuritaire, le Bénin, autrefois perçu comme un maillon faible, opère une mue spectaculaire. En huit ans, son armée s’est affranchie d’un héritage de vulnérabilités pour incarner un rempart régional.
En effet, les chiffres dévoilés par le ministre de la Défense, Fortunet Alain Nouatin, lors d’un bilan d’étape, dessinent une trajectoire aussi ambitieuse qu’inédite : le taux de disponibilité opérationnelle des forces armées, qui frôlait à peine 17 % en 2016, culmine aujourd’hui à 78 %, épousant les standards internationaux. Une renaissance orchestrée par un sursaut salvateur, mariant vision stratégique et pragmatisme.
Le Bénin, 2016-2024 : de la fragilité chronique à la résilience calculée
« Il y a huit ans, nos unités peinaient à répondre aux menaces, et notre marine naviguait en eaux troubles, minée par la piraterie », confie le ministre, évoquant une époque où l’inertie menaçait de devenir fatale. Un diagnostic sans fard qui a catalysé un programme pluriannuel, structuré autour d’un triptyque audacieux : infrastructures, équipement et ressources humaines. Loin des ajustements cosmétiques, ce plan a insufflé une dynamique de mutations profondes.
Infrastructures : l’armature d’une nouvelle ère
Premier pilier, les infrastructures ont été repensées pour incarner une « ossature stratégique ». Des bases militaires dotées de technologies de pointe, des centres logistiques reconfigurés pour une réactivité optimale et des installations navales modernisées ont remplacé les vestiges d’un passé vétuste. « Nous avons bâti des citadelles de la sécurité, adaptées aux défis du XXIe siècle », résume un officier supérieur sous couvert d’anonymat.
Équipement : la fin de la pénurie tactique
Le deuxième volet a rompu avec une dépendance chronique aux équipements obsolètes. Le ratio « un soldat, un fusil d’assaut », longtemps inatteignable, est désormais dépassé. L’acquisition de véhicules blindés, d’hélicoptères de combat Mi-17 et H125M, ainsi que d’avions de surveillance Beechcraft King Air, a transformé l’arsenal béninois. La marine, hier paralysée, dispose aujourd’hui de patrouilleurs ultramodernes capables de traquer les menaces en haute mer.
Ressources humaines : l’humus de la performance
Avec plus de 9 000 recrues intégrées entre 2019 et 2025, l’armée a renouvelé son vivier, combinant jeunesse et expertise. Des programmes de formation accélérée, conçus avec l’appui de partenaires étrangers, ont hissé les compétences techniques et tactiques. « Nous avons insufflé une culture de l’excellence opérationnelle », souligne le ministre, insistant sur la « professionnalisation accélérée » des troupes.
Résultats : un bilan en demi-teinte… Mais porteur d’espoirs
Les fruits de cette métamorphose sont tangibles. Aucun acte de piraterie n’a été enregistré dans les eaux béninoises depuis fin 2021, un exploit pour un pays dont les côtes étaient jadis un sanctuaire de brigandage. Sur le front antiterroriste, les attaques se raréfient après des opérations ciblées ayant infligé des pertes lourdes aux groupes jihadistes. « L’armée est aujourd’hui pleinement opérationnelle », martèle Fortunet Alain Nouatin, sans occulter les défis persistants.
Le Bénin, 2026 : L’Acmé opérationnel en ligne de mire
Le Bénin ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Objectif affiché : atteindre 96 % de disponibilité opérationnelle avant 2026. Un pari audacieux, qui exigera de pérenniser les investissements et de consolider les gains. « Cette progression n’est pas une fin en soi, mais un tremplin pour garantir notre souveraineté et contribuer à la stabilité régionale », précise le ministre, rappelant que la sécurité est un « bien commun ».
Entre ombre et lumière : le défi de la durabilité
Si les avancées impressionnent, certains observateurs pointent des écueils potentiels : dépendance accrue aux fournisseurs étrangers, risques de corruption dans les marchés d’équipement et pression budgétaire face à des ambitions colossales. « La vraie réussite sera de maintenir cette dynamique sur le long terme », analyse un expert ouest-africain, sous couvert d’anonymat.
Une nouvelle silhouette sur l’échiquier régional
En conclusion, en se muant en acteur militaire crédible, le Bénin redéfinit son rôle dans un paysage sécuritaire ouest-africain en pleine recomposition. Cette ascension, aussi rapide que méthodique, pourrait inspirer d’autres nations aux prises avec des défis similaires. Reste à savoir si cette mue structurelle saura résister aux tempêtes à venir…