Mahamoud Ali Youssouf : Un Phénix diplomatique à la tête de l’UA

Addis-Abeba/Éthiopie, 17 février 2025 — Dans un tourbillon de scrutins acharnés et de manœuvres géopolitiques, les dirigeants africains ont hissé…

Lors du 38ᵉ Sommet de l’Union Africaine, le diplomate djiboutien Mahamoud Ali Youssouf a été élu président de la Commission de l’UA

Addis-Abeba/Éthiopie, 17 février 2025 — Dans un tourbillon de scrutins acharnés et de manœuvres géopolitiques, les dirigeants africains ont hissé ce samedi Mahamoud Ali Youssouf, 59 ans, à la présidence de la Commission de l’Union Africaine (UA). En effet, ce Djiboutien, dont le parcours épouse les contours d’une odyssée diplomatique, succède au Tchadien Moussa Faki Mahamat, après deux mandats marqués par des défis continentaux persistants. Une consécration méritoire pour cet architecte de la coopération internationale, dont l’élection résonne comme un appel à la renaissance institutionnelle de l’UA.

Une ascension tissée d’érudition et de pragmatisme : biographie d’un visionnaire trinitaire

Né à Djibouti en 1966, Mahamoud Ali Youssouf incarne l’érudition polyglotte et l’agilité diplomatique. Formé dans les alcôves académiques prestigieuses de la Maîtrise en Langues Étrangères Appliquées (Lyon II) au Programme de Management Public de l’École Nationale d’Administration Publique du Canada, il maîtrise le français, l’anglais et l’arabe, une triade linguistique qui a forgé son aura sur la scène internationale.

Par ailleurs, son parcours gouvernemental, débuté en 1993 au ministère djiboutien des Affaires étrangères, culmine avec son rôle de Ministre des Affaires Étrangères et de la Coopération Internationale depuis 2005. Durant deux décennies, il a restructuré son ministère, fondé l’Institut des études diplomatiques de Djibouti et médié des conflits épineux, comme la réconciliation entre la Somalie et le Somaliland.

Parcours académique en mosaïque   

– 1989 : Certificat d’anglais de l’Université d’Oxford.

– 1990 : maîtrise en langues étrangères appliquées (Lyon II).

– 1995 : Magistère en Management public (ENAP, Canada).

– 1988 : Études en gestion d’entreprise (Liverpool Business School).

L’élection : un chemin semé d’embûches 

Lors du 38ᵉ Sommet Ordinaire de l’UA, tenu du 15 au 16 février 2025 à Addis-Abeba, Youssouf a triomphé après sept tours de scrutin, face à des rivaux de poids : l’ex-Premier ministre kényan Raila Odinga et l’ancien ministre malgache Richard Randriamandrato. Grâce à une campagne axée sur le consensus et au soutien des blocs francophones et musulmans, il a recueilli 33 voix sur 49, scellant ainsi son destin à la tête de l’institution.

Stratégie gagnante :  

– Alliances ciblées : soutien de l’Organisation de la coopération islamique et de la Ligue Arabe.

– Discours unificateur : priorisation du dialogue technocratique sur le charisme personnel, contrastant avec l’approche d’Odinga, perçu comme trop « personnalisé ».

Priorités stratégiques : une feuille de route audacieuse

Dans son allocution post-électorale, Youssouf a esquissé une vision où « l’Afrique rayonne par son intégrité et son unité ». Ses engagements clés incluent :

  1. Renforcement du Conseil de Paix et de Sécurité : optimiser la prévention des conflits, notamment au Soudan et en RDC, où l’UA peine à imposer son autorité.
  2. Opérationnalisation de la Force africaine en attente : une ambition vieille de deux décennies, cruciale pour l’autonomie sécuritaire du continent.
  3. Financement autonome de l’UA : réduire la dépendance aux bailleurs extérieurs, en exploitant la Zone de Libre-Échange Continentale Africaine (ZLECAF), dont il fut un artisan.
  4. Libre circulation transcontinentale : briser les barrières économiques et humaines pour une intégration tangible.

Défis et attentes : le poids d’un héritage fragile

Si son élection est saluée comme un « souffle nouveau » par ses pairs, Youssouf hérite d’une institution en quête de légitimité. En 2023, 93 % des résolutions de l’UA sont restées lettre morte, illustrant ainsi un déficit criant d’efficacité. Les défis immédiats incluent :

– Crises géopolitiques : conflits au Sahel, tensions en RDC et instabilité au Soudan.

– Influence des puissances étrangères : contrecarrer l’ingérence croissante d’acteurs extérieurs dans les affaires africaines.

– Réformes structurelles : moderniser la bureaucratie de l’UA et restaurer la confiance des États membres.

Un homme au carrefour des cultures  

Au-delà de la politique, Youssouf incarne une synthèse rare entre tradition et modernité. Fondateur du village de Sourat (65 logements, école, mosquée), il marie également engagement communautaire et passion pour l’histoire et la pêche. Décoré Commandeur de l’Ordre National de djiboutien en 2012, son humanisme transcende les frontières.

L’aube d’une nouvelle ère ?  

Mahamoud Ali Youssouf incarne l’espoir d’une UA recentrée sur ses missions fondamentales : paix, intégration et souveraineté. Alors que Djibouti, petit État stratégique de la Corne de l’Afrique, célèbre cette ascension, le continent observe, sceptique, mais curieux, si ce « phénix diplomatique » saura renaître des cendres des échecs passés. Comme il l’a déclaré : « L’Afrique que nous voulons n’est pas une utopie, mais un projet collectif à portée de main. »

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