CRIMJUST III : le Bénin traque l’argent du crime

Face à l’essor des cartels et à l’intensification du blanchiment transfrontalier, le Bénin renforce ses capacités d’enquête financière à travers…

CRIMJUST III : À Cotonou, une session de formation intensive réunit les forces de l’ordre béninoises autour d’Interpol et de l’ONUDC. UE. Bénin

Face à l’essor des cartels et à l’intensification du blanchiment transfrontalier, le Bénin renforce ses capacités d’enquête financière à travers la phase 3 du programme CRIMJUST III. Dans ce cadre, une formation stratégique organisée à Cotonou mobilise magistrats, policiers et experts internationaux, avec pour objectif de démanteler les circuits occultes et de consolider l’État de droit.

 

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Cotonou, 22 octobre 2025 – Dans un contexte où les cartels transnationaux blanchissent des fortunes issues du trafic illicite, le Bénin intensifie sa lutte contre les réseaux financiers clandestins. Ainsi, du 21 au 23 octobre, une session intensive de formation réunit à Cotonou des magistrats, enquêteurs et officiers de police spécialisés, sous l’égide du Programme mondial de perturbation des réseaux criminels (GPCD) – CRIMJUST. Animée par des experts d’Interpol et soutenue par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), cette initiative vise à renforcer les capacités d’investigation pour démanteler les chaînes de financement du commerce de stupéfiants, tout en élargissant le champ d’action à la délinquance économique globale.

 

Des outils pour décortiquer les montages financiers complexes

 

Concrètement, l’atelier réunit une trentaine de participants issus des services répressifs béninois. Il met l’accent sur les méthodes contemporaines de traçabilité des flux monétaires suspects. à travers l’analyse de cas réels, les stagiaires apprendront à identifier les transferts dissimulés via des sociétés écrans, les cryptomonnaies anonymes ou encore les investissements immobiliers fictifs.

« Ces compétences sont vitales pour transformer des soupçons en preuves irréfutables, brisant ainsi le cycle vicieux du crime organisé », explique un formateur d’Interpol, soulignant l’importance d’une approche multidisciplinaire alliant droit pénal et analyse forensique.

Cette formation répond à une urgence régionale : en tant que porte d’entrée stratégique en Afrique de l’Ouest, le Bénin voit transiter des tonnes de cocaïne en provenance d’Amérique du Sud, alimentant une économie souterraine qui fragilise durablement la stabilité sociale et institutionnelle. Dans cette optique, CRIMJUST dote les acteurs locaux de protocoles d’intervention standardisés, afin de renforcer les collaborations transfrontalières et d’éviter que les fonds illicites ne se volatilisent aux frontières.

CRIMJUST III : une offensive européenne contre les mafias globales

 

Depuis début 2023, l’Union européenne pilote la troisième phase de ce programme ambitieux, baptisé CRIMJUST III, dans le cadre de son initiative sur les flux illicites (GIFP). Son objectif est clair : réduire l’emprise des réseaux mafieux et de la corruption sur la gouvernance et la sécurité publique. À ce titre, le projet couvre l’Afrique subsaharienne, l’Amérique latine et les Caraïbes — principaux corridors du trafic — et finance des enquêtes croisées, des poursuites judiciaires renforcées ainsi que des échanges d’informations sécurisés entre pays partenaires.

Au Bénin, pays pilote en Afrique de l’Ouest, les résultats commencent à se faire sentir : plusieurs opérations conjointes ont déjà permis des interceptions spectaculaires de cargaisons et des gels d’avoirs.

« L’Europe ne se contente pas d’observer ; elle équipe les nations vulnérables pour qu’elles deviennent des remparts actifs contre ces menaces hybrides », souligne un diplomate européen impliqué, évoquant un investissement de plus de 50 millions d’euros pour cette phase.

 

Un rempart pour l’État de droit en péril

 

À l’heure où les cartels diversifient leurs itinéraires — des ports de Lagos aux aéroports de Cotonou — cette formation marque un jalon décisif. Elle prépare le terrain pour une justice plus réactive, capable non seulement de sanctionner, mais aussi d’asphyxier financièrement les criminels. De leur côté, les autorités béninoises saluent cette manne européenne comme un bouclier contre l’érosion de l’État de droit, dans un sous-continent où la corruption ronge jusqu’aux fondations institutionnelles.

À l’issue de ces trois jours, les stagiaires repartiront avec un réseau d’experts et des outils numériques pour traquer en temps réel les mouvements suspects. Un pas de plus vers un Bénin résilient, où la loi reprend le dessus sur les ombres du profit illégal.

 

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