Le Port Autonome de Cotonou (PAC), poumon économique du Bénin, s’est paré d’une aura particulière le vendredi 11 avril dernier en accueillant une hôte de marque : Mme Nnenna Nwabufo, vice-présidente de la Banque Africaine de Développement (BAD). En effet, loin des habituels cortèges protocolaires, cette visite s’est distinguée par une démarche empreinte d’humanité et de pragmatisme. En choisissant de s’entretenir directement avec les femmes qui animent le port de pêche, Mme Nwabufo a mis en lumière leur rôle cardinal dans l’économie locale, tout en scrutant les écueils qui jalonnent leur quotidien. Cette initiative, à la croisée de la reconnaissance et de l’écoute, illustre une ambition plus vaste : celle d’un développement inclusif, où chaque voix, même la plus discrète, trouve un écho.
Nnenna Nwabufo : une immersion au cœur du port de pêche
Le port de Cotonou, l’un des plus dynamiques d’Afrique de l’Ouest, ne se résume pas à ses quais grouillants ou à ses conteneurs empilés. C’est aussi un lieu où s’entrelacent des destins, notamment ceux des femmes du port de pêche, qui, par leur labeur, soutiennent des familles et irriguent l’économie béninoise. Mme Nnenna Nwabufo, forte de son expérience à la tête des opérations de la BAD dans plusieurs régions africaines, a fait de cette communauté le pivot de sa visite. Accompagnée des responsables du PAC, elle a arpenté les abords du port, là où les filets se mêlent aux conversations, pour s’immerger dans la réalité de ces travailleuses.
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Ces femmes, mareyeuses, transformatrices de poisson ou gestionnaires de petits commerces, incarnent une résilience forgée face à des conditions souvent rudes. Selon des données récentes de la BAD, elles contribuent à hauteur de 30 % aux revenus du secteur de la pêche artisanale au Bénin, un chiffre qui masque pourtant les défis qu’elles affrontent : accès limité au crédit, infrastructures vétustes et concurrence accrue. La vice-présidente, dans un dialogue dénué d’artifice, a recueilli leurs témoignages, s’enquérant des obstacles – manque de chambres froides, coûts élevés des intrants – tout en saluant leur ténacité.
Un hommage à la force féminine
Au fil des échanges, Mme Nwabufo n’a pas ménagé ses mots pour célébrer l’apport de ces femmes à la vitalité économique de Cotonou. « Leur courage est une leçon, leur détermination un moteur », a-t-elle déclaré, selon des propos rapportés par le service de communication du PAC. Cette reconnaissance, loin d’être une simple formule, s’inscrit dans la stratégie de la BAD, qui, à travers son initiative AFAWA (Affirmative Finance Action for Women in Africa), ambitionne d’investir 5 milliards de dollars d’ici 2030 pour autonomiser les entrepreneuses africaines. À Cotonou, cet engagement prend une résonance concrète : la BAD finance depuis 2023 un projet pilote au port de pêche, incluant la modernisation des unités de transformation et la formation de 200 femmes à la gestion financière.
Cette visite n’était pas une première pour la BAD, qui soutient le PAC depuis deux décennies via des prêts pour l’extension des infrastructures et l’amélioration de la logistique. En 2024, un financement de 50 millions d’euros a permis de renforcer la sécurité portuaire et d’optimiser les chaînes d’approvisionnement, bénéficiant indirectement aux acteurs du port de pêche. Mais en plaçant les femmes au centre de son déplacement, Mme Nwabufo a marqué une inflexion, signalant que le développement ne saurait se mesurer uniquement en tonnes de marchandises, mais aussi en vies transformées.
Nnenna Nwabufo : une écoute pour un avenir à construire
L’échange avec les pêcheuses n’a pas été un monologue. La vice-présidente, formée à l’école de la rigueur nigériane et rodée aux subtilités des politiques africaines, a posé des questions précises, notant les suggestions des femmes pour améliorer leur quotidien : accès à des microcrédits sans garantie prohibitive, création d’un marché dédié aux produits transformés, ou encore renforcement des formations en hygiène alimentaire. Ces idées, recueillies avec attention, pourraient nourrir les futurs programmes de la BAD au Bénin, où le secteur informel, dominé par les femmes, représente près de 70 % de l’économie, selon l’Institut National de la Statistique et de l’Analyse Économique.
Cette visite, bien que brève, s’inscrit dans une série d’initiatives menées par la BAD pour promouvoir l’inclusion économique. Quelques jours plus tôt, Mme Nwabufo avait inspecté un projet d’agriculture durable à Porto-Novo, soulignant l’importance des chaînes de valeur locales. À Cotonou, elle a réaffirmé cette vision, rappelant que la prospérité du continent repose sur la capacité à élever celles qui, trop souvent, restent dans l’ombre.
Une promesse à tenir
Le passage de Mme Nnenna Nwabufo au port de Cotonou n’est pas un simple jalon dans un agenda chargé ; il est une invitation à repenser le développement à l’aune de l’équité. Les femmes du port de pêche, par leur ardeur et leurs aspirations, ont trouvé en elle une alliée attentive, mais les défis qu’elles ont exposés appellent des réponses durables. Alors que le soleil se couchait sur les eaux scintillantes du Golfe de Guinée, une question flottait dans l’air : la BAD, avec ses milliards et ses plans, saura-t-elle transformer ces paroles en actes, pour que ces femmes, piliers invisibles de l’économie, deviennent les architectes reconnues d’un avenir plus juste ?