Malanville, 31 janvier 2025 — Sous un soleil cuivré, la cour de l’hôtel de ville de Malanville s’est transformée, ce vendredi, en scène symbolique d’une résistance silencieuse. Ici, ce ne sont pas des armes qui ont été brandies, mais des pelles, des générateurs et des kits d’irrigation. Le Ministre de l’Intérieur, Alassane SEIDOU, et Titus OSUNDINA, émissaire du PNUD, ont officié la remise de matériels d’une valeur de 53,338 millions de FCFA à des coopératives et groupements des communes de Malanville, Karimama et Kandi. Une initiative ancrée dans un projet binational (Bénin-Niger) visant à désamorcer les conflits agro-pastoraux et à tarir le terreau de l’extrémisme violent.
Labourer les champs plutôt que les rancœurs à Malanville
Dans cette région frontalière, où la transhumance rythme les saisons autant que les tensions, le projet mise sur une alchimie inédite : convertir les outils agricoles en boucliers sociaux. L’approche HIMO (haute intensité de main-d’œuvre), privilégiant les chantiers à forte employabilité, se veut un antidote à l’oisiveté, ce « ventre mou » que ciblent les groupes armés pour recruter. « Ces équipements ne sont pas de simples objets, mais des semences de dignité », a lancé SEIDOU, enjoignant les bénéficiaires à en faire des leviers de prospérité.
Parmi les récipiendaires, des femmes aux mains calleuses et des jeunes au regard déterminé écoutent religieusement. L’un d’eux, portant une casquette usée, murmure : « Avant, nos journées se perdaient en attentes vaines. » « Désormais, chaque goutte de sueur aura un sens. »
L’économie comme artisan de paix
Le matériel remis, motopompes, décortiqueuses, kits de transformation agroalimentaire, doit permettre de « densifier le tissu économique local », selon les termes d’OSUNDINA. Objectif affiché : créer des micro-entreprises capables d’absorber la colère sociale. « Quand un jeune gagne sa vie à cultiver du soja plutôt qu’à manier un fusil, c’est toute la communauté qui respire », appuie une responsable d’ONG locale.
Les chiffres parlent en clair-obscur : dans l’Alibori, zone prioritaire, près de 60 % des 18-35 ans étaient jusqu’ici sans activité régulière. Un vide que le projet ambitionne de combler en générant 1 200 emplois directs d’ici fin 2025.
Malanville : un serment collectif face à la menace
La cérémonie, empreinte de solennité, a vu défiler des discours où l’espoir le disputait à la vigilance. « Ces outils resteront muets si vos mains ne leur prêtent pas voix », a averti SEIDOU, rappelant que le salut viendrait de l’audace entrepreneuriale plus que de l’assistanat.
Du côté des bénéficiaires, la représentante des coopératives, une femme drapée de wax aux motifs éclatants, a juré : « Ces machines, nous en ferons des forges où se modelera notre autonomie. » Promesse scellée par la remise symbolique d’une clé géante, métaphore d’un avenir à déverrouiller.
Cultiver l’invisible
Derrière les sourires et les poignées de main officielles persiste une question : et si la vraie récolte de ce projet n’était pas mesurable en tonnes de céréales, mais en paix préservée ? Alors que le Sahel voisin suffoque sous les violences, le Nord-Bénin tente d’écrire une autre partition, où le développement économique se mue en sentinelle contre les obscurantismes.